9 février 2004
Communiqué de presse
« Dossier Noir » sur le logement et la pauvreté
Le revenu des locataires de Saguenay a diminué de 30,2 % depuis 1980
Même si la région métropolitaine de Saguenay échappe pour le moment à la pénurie de logements locatifs qui frappe la plupart des grands centres urbains du Québec, elle est aux prises avec un problème tout aussi alarmant, celui de l’appauvrissement des locataires qui représentent 37,7 % des ménages de la région.
C’est à cette conclusion qu’en vient un Dossier noir sur le logement et la pauvreté que Loge m’entraide et le Front d’action populaire en réaménagement urbain ont rendu public en conférence de presse aujourd’hui. Ce dossier, basé sur les données du recensement canadien de 2001, démontre que le revenu médian des ménages locataires de la région métropolitaine de Saguenay a diminué de 30,2 % en dollars constants entre 1980 et 2000, ce qui est de loin supérieur à la moyenne provinciale qui était de 17,5 %. En 2000, le revenu médian des ménages locataires n’était que de 22 247 $ dans la région contre 26 088 $ à l’échelle du Québec.
Loge m’entraide et le FRAPRU voient dans cet appauvrissement l’explication du nombre important de ménages locataires devant consacrer plus de la moitié de leur revenu en loyer. Lors du recensement de 2001, ils étaient 4485 dans cette situation, dont 4450 dans la seule ville de Saguenay (arrondissements Chicoutimi, Jonquière et La Baie). De ce nombre, 3535 ménages devaient engloutir plus de 60 % du revenu en frais de loyer. Pire encore, pour 2500 ménages locataires, c’est plus de 80 % du revenu qui passait en loyer. Dans ce dernier cas, il s’agit de plus d’un ménage locataire sur dix (10,7 %), ce qui est là aussi supérieur à la moyenne provinciale (9 %).
Renversant
Sonia Côté, coordonnatrice de Loge m’entraide est renversée par ces statistiques: «Comment pouvez-vous arriver à vous nourrir, vous vêtir, vous soigner quand un pourcentage aussi disproportionné de votre revenu passe en loyer?». Elle ajoute que les femmes sont particulièrement victimes de cette situation. Selon le recensement de 2001, les ménages dont le principal soutien financier est une femme comptaient pour 60 % des ménages locataires consacrant plus de la moitié de leur revenu en loyer et pour 56 % de ceux qui y engloutissent plus de 80 %.
Marie-José Corriveau, porte-parole du FRAPRU, explique en partie l’appauvrissement des locataires par le fait que les personnes seules, qui ont généralement des revenus inférieurs, représentent une part grandissante des locataires de Saguenay. En 2001, elles comptaient pour 46 % de ménages locataires. Sonia Côté voit dans les pertes d’emplois mieux rémunérés subies dans la région une autre raison de ce phénomène. Elle ajoute que des revenus comme l’aide sociale et le salaire minimum n’ont pas suivi la hausse du coût de la vie, alors que le taux de prestation d’assurance-emploi a subi une sérieuse baisse, suite aux réformes successives du gouvernement fédéral.
Loge m’entraide répond à un besoin
Du 13 avril 1998 au 1 avril 2003, 5 003 personnes locataires ont eu recours aux services individuels de Loge m’entraide. Pour la dernière année financière complétée (1 avril 2002 au 31 mars 2003), 1428 demandes d’aide qui ont été logées à l’organisme.
Comme l’indique Steeve Côté, intervenant social à Loge m’entraide depuis septembre dernier : « Loge m’entraide répond à un besoin essentiel dans la région. Les personnes locataires à faible revenu se réfèrent à notre organisme chaque jour pour connaître leurs droits et recours et chercher un moyen de se sortir de la pauvreté. La plupart d’entres elles doivent consacrer plus de la moitié de leur revenu au loyer. Il est clair que le logement social est une formule de plus en plus privilégiée par les locataires appauvries, leur permettant de consacrer 25 % de leur revenu au loyer ».
À Saguenay, 700 ménages attendent un logement social. Parmi ces 700 ménages, 595 attendent un HLM (Jonquière : 284, Chicoutimi : 247 La Baie : 64), et 75 ménages à ville d’Alma. Loge m’entraide rappelle qu’une centaine de ménages sont aussi en attente de logements coopératifs.
Un appel au ministre des Finances
À quelques semaines du budget québécois, le FRAPRU et Loge m’entraide ont lancé un appel pressant au ministre des Finances, Yves Séguin, pour qu’il prévoit des investissements importants permettant de s’attaquer plus sérieusement au problème du logement. Ils lui ont demandé de donner des suites concrètes à l’ouverture démontrée aux premiers jours de sa consultation pré-budgétaire.
Ils réclament le financement de 8000 nouveaux logements sociaux par année à l’échelle du Québec, dont la moitié passant par la mise sur pied d’un programme de HLM et l’autre moitié en coopératives d’habitation et en logements sans but lucratif. De ces 8000 logements, plus de 160 pourraient se réaliser année après année dans la ville même de Saguenay, selon Sonia Côté qui espère que le budget Séguin permettra de faire des pas sérieux en ce sens. Le FRAPRU rencontrait justement le ministre des Finances à ce sujet, ce matin, à Montréal.